Protection de l’enfance : « La situation n’est pas satisfaisante »
La Cour des comptes pointe la mauvaise application de la loi de 2007 sur la protection de l’enfance. Les structures d’accueil des jeunes en danger seraient trop peu contrôlées et les rôles mal répartis entre judiciaire et administratif.
Les jeunes en danger pâtissent d’une application « pas satisfaisante » de la loi sur la protection de l’enfance, a jugé jeudi la Cour des comptes, estimant que les structures d’accueil sont trop peu contrôlées et les rôles mal répartis entre judiciaire et administratif.
« La situation n’est pas satisfaisante », a déclaré lors d’un point presse le président de la Cour des comptes Phillippe Séguin, en présentant un bilan de la loi sur la protection de l’enfance en 2007.
Il a évoqué un risque de « maltraitance institutionnelle » contre les enfants. « L’insuffisance » la plus « préoccupante » concerne l’exécution des décisions de justice, selon la Cour, qui a relevé des « délais très excessifs », pour les décisions de placement par exemple.
« Ballottés d’institution en institution »« On constate que le parcours des enfants protégés est souvent long et chaotique. Les enfants, déjà fragilisés, subissent donc les effets des défauts d’organisation de la prise en charge », a affirmé Philippe Séguin, rappelant que la protection de l’enfance représente environ 6 milliards d’euros par an.
« Souvent ballottés d’institution en institution et dans certains cas, faute de solution adaptée, ils sont remis à leurs familles et parfois même hébergés à l’hôtel », a-t-il dénoncé, relevant qu’à Paris en 2006, « 65 jeunes confiés à l’aide sociale à l’enfance étaient hébergés à l’hôtel ! ».
La Cour a aussi regretté que « les juges ordonnent 82% des mesures » alors que « de nombreux cas (…) pourraient et devraient être traités par le département ».
« La qualité des prises en charge est trop peu contrôlée », a aussi relevé la Cour, notant que « les aides financières » aux familles ou « l’intervention d’un travailleur social » à domicile « constituent une forme de soutien épisodique dont personne ne cherche à mesurer l’efficacité ».
« Un contrôle tous les 26 ans ! »Quant aux établissements d’hébergement, « la plupart des départements s’appuient » sur les associations qui les gèrent « trop souvent sans les remettre en cause ». « Au rythme actuel, un établissement du secteur associatif est contrôlé par l’Etat en moyenne tous les 26 ans ! », a déploré Philippe Séguin, estimant même que « personne ne contrôle quoi que ce soit ».
Philippe Séguin a appelé les conseils généraux à « assurer leur rôle central », comme la loi de 2007 les y incitaient, notamment en revoyant les autorisations d’accueil trop anciennes.
« L’offre est donc rigide et souvent on a l’impression que c’est elle qui conditionne les décisions plutôt que l’analyse du besoin réel des enfants », a ajouté Philippe Séguin.
La Cour a aussi regretté que les départements ne reçoivent « pas systématiquement » les informations concernant les enfants en danger, « notamment parfois celles connues des médecins ou de l’Education nationale ».
La protection de l’enfance a concerné 300.000 jeunes en 2007, dont la moitié fait l’objet d’un placement hors de la famille et l’autre de mesures éducatives.
La protection administrative, baptisée Aide sociale à l’enfance (ASE), est confiée au département. Les juges prennent par ailleurs des mesures que selon la Cour « rien de distingue au fond des décisions » prises par l’ASE.
L’enquête a porté sur 17 départements, 18 tribunaux de grande instance, 8 Cours d’appel, 5 services départements de protection judiciaire de la jeunesse et « plusieurs » associations.
(Source AFP)